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À la fin du 19e siècle et au tournant du 20e, le paysage musical nord-américain n’était pas celui qu’il est aujourd’hui. Manquant de Grandes Écoles, les jeunes musiciens quittaient le continent et se préparaient à aller étudier en Europe. Les orchestres New Yorkais importaient des musiciens français et les nouvelles technologies d’enregistrement présentaient les musiciens français et leurs styles au public américain. L’optimisme d’après la Grande Guerre de 1914 et l’essor économique des années folles de New York ont vu le développement et la création des grandes institutions artistiques américaines d’aujourd’hui.
Lors de la mort du magnat du textile Augustus D. Juilliard (1836-1919), sa fortune de 5 millions de dollars fut donnée à la promotion de la musique. Né de parents issus de la classe ouvrière immigrante française, Juilliard était un homme autodidacte et un grand protecteur des arts tout au long de sa vie. Il fut président du Metropolitan Opera pendant près de trois décennies. En 1920, la Juilliard Foundation vue le jour et ses administrateurs fondèrent plus tard la Juilliard School afin d’offrir une éducation musicale de premier ordre aux États-Unis. Avec la convergence du capital (culturel et financier), New York est rapidement devenue un pôle musical majeur sur la scène mondiale.
Les compositeurs et interprètes du jour étaient mêlés à la haute société au cours des derniers jours insouciants qui ont précédé la Grande Dépression. Cette époque artistique fertile avait de nombreux styles musicaux distincts contrairement à l’ homogénéité souvent présente dans les salles de concert d’aujourd’hui. Cette période est marquée par la combinaison de l'ancien et du nouveau; le portamento, la modification du tempo et la dislocation mélodique du 19e siècle se sont unis à une utilisation plus prononcée du vibrato et à de nouvelles techniques étendues. Les programmes des concerts épousèrent les répertoires contemporains et anciens d’une manière qui est désormais la norme.
Même si les performances de l’époque purent être enregistrées, la vérité est que nous ne pouvons rien dire avec certitude; les sources primaires et secondaires, aussi précieuses soient-elles, ne racontent qu’une minime partie de l’histoire. Les instruments, la musique, les sources et les anecdotes se confirment et se contredisent. Au final, il y a multiplicité d'authenticité; nous ne pouvons offrir ce que cela aurait pu être. Comme le disait le compositeur Arnold Bax: «Tous les artistes sont influencés par des forces incontrôlables. […] Ils doivent beaucoup à d'autres artistes, passés et présents, dont ils admirent le travail »
Avec son éclosion tardive, Jean-Philippe Rameau (1683-1764) n’était que peu connu avant 1722. Il devint célèbre en tant que théoricien et compositeur. Malgré sa popularité, il resta un personnage controversé pour ses harmonies et son style modernes. Les Pièces de clavecin en concerts (1741) sont parmi les premières à donner au clavecin un rôle principal plutôt qu’un rôle de soutien, mais après la Guerre des Bouffons, les goûts changèrent et sa musique commença à se démoder pour finalement disparaître.
Alors que le sentiment anti-allemand grandissait en France à la suite de la guerre franco-prussienne (1870-1871), l'interprétation de la musique allemande déclina et le nationalisme français apparut. La Société Nationale de Musique fut cofondée par Camille Saint-Saëns (1835-1921) dans le but d'offrir aux compositeurs français des possibilités de performance. Revisitant les grands maîtres de l’histoire de France, Saint-Saëns édita les œuvres de Rameau pour son éditeur Durand en 1896, faisant revivre les Pièces de clavecin pour le 20e siècle (il ne semblait pas intéressé à cadrer la musique dans son contexte historique). À New York, au début du 20e siècle, des musiciens tels que le compositeur-harpiste Carlos Salzedo (1885-1961) continuèrent à jouer et à enregistrer les œuvres de Rameau des éditions Durand, peu sensibilisées à la pratique de la performance historique.
En 1778, Wolfgang Amadeus Mozart (1756-1791) se rendit à Paris à la recherche de travail. Rapidement à court d'argent et se retrouvant endetté, Mozart se mit à mettre ses biens en gage en désespoir de cause. Pour compliquer les choses, Anna Maria, la mère de Mozart, tomba malade et n'ayant pas les moyens financiers suffisants pour consulter un médecin cela mena à son décès. L’ambiance de la Sonate pour piano et violon no. 21 en mi mineur K. 304 (1778), écrite à la nouvelle de la mort de sa mère, reflète cette période particulièrement difficile pour Mozart. Fait révélateur, c'est sa seule sonate pour violon écrite en ton mineur. Lors de la représentation de ce soir, la sonate a été arrangée pour harpe et flûte d’après l'édition Flesch-Schnabel de 1912 pour l'International Music Company, contenant des marques de phrasé contemporaines et des «corrections» anachroniques.
Une des œuvres les plus populaires de Sergei Rachmaninoff (1873-1943), tant du point de vue historique que modernes, est la triste Vocalise de 14 Romances, op. 34 (1915). Déprimé et lourdement endetté, Rachmaninov émigra aux États-Unis en 1918 pour suivre des offres d'emploi en tant que pianiste solo, chef d'orchestre et artiste-interprète. Il put vivre dans le luxe et devenir célèbre grâce à des tournées aux États-Unis, des enregistrements et à une association avec le fabricant de pianos Steinway and Sons. Vocalise était une des favorites des récitals populaires dans les années 1920, souvent jouées par les vedettes instrumentistes de l'époque, telles que la violoniste Jascha Heifetz et la theréministe Clara Rockmore.
Le compositeur anglais Edward Elgar (1857-1934) fut l'un des premiers compositeurs à comprendre l'importance du gramophone nouvellement développé. La technologie s’améliorant rapidement, Elgar enregistra nombre de ses œuvres pour orchestre entre 1914 et 1925. Sa Chanson de Nuit, op. 15, no. 1 et Chanson de Matin, op. 15, no. 2 (1897) sont des compositions légères dans un style populaire et typiquement anglais. Publié à l'origine pour alto et piano, violon et piano, et arrangé deux ans plus tard pour orchestre de chambre, cet arrangement est basé sur les éditions du compositeur propres aux éditions 1899 et 1901 du Novello & Co. Largement autodidacte et né d'un statut socio-économique inférieur, Elgar se sentait sous-estimé par l’établissement musical britannique. Cependant, le célèbre compositeur et virtuose du violon autrichien Fritz Kreisler (qui a commanda et joua le Concerto pour violon d’Elgar en 1910) déclara à un journaliste britannique: «Si vous voulez savoir qui je considère comme le plus grand compositeur vivant, je le dis sans hésitation, Elgar».
Claude Debussy (1862-1918) est considéré comme l'un des compositeurs les plus influents de la fin du 19e siècle et du début du 20e siècle. Sa musique luxuriante trahit sa dure personnalité: il écrivit au compositeur Chausson: “J”ai en ce moment l’âme gris-fer et de tristes chauves-souris tournent au clocher de mes rêves”. La flûte de Pan (1913) fut écrite comme musique de scène pour Psyché, pièce en trois actes du symboliste Gabriel Mourey (1865-1943). Les lettres entre le compositeur et le dramaturge montrent qu’à quelques semaines seulement de la première, Debussy n’avait rien accompli. Le solo de flûte doux et sensuel apparaît dans une scène entre deux nymphes, à la limite de l'érotisme. Tandis que Pan joue de la flûte au loin, l'Oréade convainc la craintive Naïde d'écouter et de se laisser séduire par sa chanson; se livrer et de venir sans peur.
Homme sans peur, le Français Carlos Salzedo est considéré comme le plus important harpiste du 20e siècle. Immigré à New York en 1909 à l'invitation du maestro Toscanini pour jouer dans l'orchestre du Metropolitan Opera House, il démissionna de son poste en 1913 et partit en tournée aux États-Unis et à l'étranger. Le déclenchement de la Grande Guerre voit Salzedo intégré dans l'armée française, ne revenant qu'à New York et à ses activités musicales deux ans plus tard. Par le biais d’une association avec le légendaire danseur de ballet et chorégraphe Vaslav Nijinksy, Salzedo développe une technique de jeu de harpe associant gestes physiques et gestes musicaux, prolongeant et codifiant le vocabulaire musical de l’instrument dans son état actuel; Bartok, Britten, Milhaud, Prokofiev, Schoenberg et Stravinsky (pour n'en nommer que quelques-uns) ont tous écrit pour la harpe d'une manière qui utilisait les nouvelles techniques et la nouvelle notation de Salzedo.
En 1921, Salzedo et son compatriote expatrié Edgar Varèse, cofondèrent l'International Composers Guild, une association promouvant la musique nouvelle. Les enregistrements et les tournées de son Trio de Lutèce avec le flûtiste Georges Barrères présentèrent la musique de Debussy à un nouveau public. Ses 5 Préludes pour Harpe seule (1917) représentent la musique la plus moderne du programme de ce soir; la musique de Salzedo de cette époque est fortement colorée dans les tons de Debussy, alors qu'elle fait allusion au post-tonalisme qui caractérise son style postérieur. Barrères (qui a joué la flûte en solo lors de la première du Prélude de Debussy) a décrit Salzedo comme un homme caustique, capricieux et désagréable, pour lequel Barrères devait souvent s’excuser de sa part.
En 1915, Debussy composa une partition audacieuse pour flûte, alto et harpe qui était auparavant inexplorée et qui allait par la suite devenir un ensemble de chambre standard. Sans le savoir, le compositeur anglais Arnold Bax (1883-1953) compléta son Elegaic Trio (1916) pour la même combinaison d'instruments. Le trio de Bax était composé en mémoire des amis perdus lors du soulèvement sanglant de l’Irlande en 1916, au cours duquel plus de 2000 ressortissants irlandais avaient été tués ou blessés lors de leur lutte pour l’indépendance de l’Empire britannique. Toute cette violence, cependant, n'est pas évidente dans la musique; les sons pastoraux luxuriants se déroulent comme s'ils rêvaient d'un monde utopique. On peut presque entendre Cathleen ní Hoolihan appeler ses enfants perdus à la maison. Sur sa musique, le critique John Cardus écriva: "On sent toujours dans la pénombre et la brousse la chaleur des manières chaleureuses d'un homme aimable et approchable".
Si Elgar était un pionnier de la technologie d'enregistrement en Grande-Bretagne, Bax ne l’était certainement pas, écrivant en 1929 que «le gramophone est globalement une invention affreuse». Tard dans sa vie, les critiques comparaient la musique de sa période d'avant 1905 à celle de Debussy. Cependant, Bax note qu'avant 1905, Debussy était inconnu des Anglais. Le style de Bax est contemporain pour cette période, mais ses intérêts et ses influences étaient souvent historiques, affirmant dans une conférence donnée par la BBC Radio en 1949:
Lors de mon audition, un poète et critique renommé a déclaré: «Grâce à Dieu, je peux retracer la généalogie littéraire de tous les poèmes que je n’ai jamais lus». Cela est vrai aussi de la musique. Peu de compositeurs ont surgi, comme Minerva, complètement armé du cerveau de Jove. Et ceux-ci, pas parmi les plus grands. Debussy et Chopin semblent avoir tiré moins que la plupart des ancêtres spirituels. Mais même dans leurs cas, on trouve un soupçon de Massenet dans l'un, et de John Field et Bellini dans l'autre.
Le ballet El amor brujo du compositeur espagnol Manuel de Falla (1876-1976) ne fut pas un succès immédiat. Falla étudia à Paris en 1907 et rencontra Debussy, Ravel et Stravinsky qui allaient tous être déterminants dans l’approfondissement de son style musical. Le déclenchement de la Première Guerre mondiale oblige Falla à retourner en Espagne où il compose ses œuvres les plus connues. Écrit en 1914 et créé en 1915, le ballet flamenco fut mal accueilli. Après avoir supprimé le dialogue, effectué plusieurs coupures et beaucoup de réorchestration, c’est dans les années 1920 que ses mouvements ont pris une vie nouvelle. L'extrait Pantomime est une mélodie séduisante andalouse accompagnée d'un accompagnement aux mesures irrégulières en 7/8 qui se balance doucement d'avant en arrière; rappelant les calmes marées côtières lors d’une chaude nuit d’été, loin de la tourmente de la guerre en cours.
Le nord de la France était occupé par les troupes allemandes, et pourtant, vous aurez bien du mal à entendre ces combats dans la Sonate pour flûte, alto et harpe (1915) de Debussy. Debussy avait l'intention d'écrire 6 sonates pour divers instruments en hommage aux maîtres français du 18e siècle. Dans une lettre à Durand, il déplora: «Qu'en est-il de la musique française? Où sont nos vieux clavecinistes qui ont produit de la vraie musique en abondance? Ils détenaient le secret de cette profondeur gracieuse, de cette émotion sans épilepsie, que nous évitons comme des enfants ingrats ».
Debussy devint de plus en plus nationaliste, comme Saint-Saëns l’avait été trente ans auparavant; bien que Saint-Saëns ait farouchement désapprouvé la musique de Debussy et cherché à s'assurer que ce dernier ne deviendrait jamais membre de l'Académie de musique (qu’il ne fut jamais). En écrivant à Durand, Debussy affiche son nationalisme: “Je veux travailler, non pas tant pour moi, que pour donner une preuve, si petite soit-elle, qu’y eût-il 30 millions de Boches sur le sol français, on ne détruit pas la pensée française”. Sur la page titre de la sonate, Debussy précise même son titre: Musicien Français. Selon le musicologue Léon Vallas, Debussy avait prévu de composer une œuvre pour flûte, hautbois et harpe, mais a ensuite décidé que l'alto conviendrait mieux au timbre de la flûte. Il ne compléta que trois des six, en raison de son état de santé qui se détériorait.
En 1916, Durand organisa une lecture privée de la sonate avec le flûtiste Albert Manouvrier, l’altiste-compositeur Darius Milhaud et la harpiste chromatique Jeanne Dalliès. Le flûtiste Marcel Moyse était présent et affirme que Debussy, bourru, répondant à une question sur un rythme écrit, choqua ceux qui se trouvaient dans la salle en criant: "Ne jouez pas ce que vous pensez que j'aurais dû écrire, jouez ce que j'ai écrit!" La musique de son époque tardive est sensiblement plus précise dans sa notation que dans les travaux antérieurs de Debussy. Les indications de tempo sont données aussi souvent qu’à chaque demi-mesure et chaque instrument a des gestes contrastés pour la même figure. Des motifs déplacés, associés à de fréquents changements métrique et de polyrythmie, donnent à la Sonate un sentiment de liberté qui n’est pas évoqué sur la page. Georges Jean-Aubry, critique musical et ami proche de Debussy, affirme que le compositeur lui a ensuite déclaré: «Je veux entendre ma sonate jouer sur autre chose que cet horrible instrument! Je veux l'entendre sur [une harpe à pédales]! ». Seul Manouvrier participa à la première représentation publique en présence du compositeur, accompagné du harpiste-pédaleur Pierre Jamet et de l'altiste Sigismond Jarecki. Jamet avait travaillé en étroite collaboration avec le compositeur et enregistra l'œuvre à plusieurs reprises au cours de sa carrière.
Comme dans le cas du trio de Bax, la sonate de Debussy imagine un paysage idéalisé apparemment éloigné des horreurs de la guerre. Son utilisation caractéristique du mode et de la gamme par tons se combine avec des éléments folkloriques français (l’ouverture de la Finale doit imiter le pipe et tabor du sud de la France) et des idées structurelles du 18e siècle. L’amour de longue date (et bien documenté) de Debussy pour l’art et l’esthétique japonais est également exposé. Parfois, on peut presque y entendre la grande vague de Katsushika Hokusai (1760-1849) s'écrouler de manière tumultueuse, tandis qu'ailleurs la flûte semble imiter le shakuhachi traditionnel. Les moments d’émotion maîtrisée de la sonate partagent la scène avec la virtuosité enjouée de la jeunesse de Debussy. Debussy nota sur la sonate: «C’est effroyablement mélancolique. Et je ne sais pas s’il faut en rire ou en pleurer? Peut-être les deux?"
Ironiquement, la composition de Sonates pour divers instruments de Debussy semble provenir de Johann Sebastian Bach (1685-1750). Juste avant de commencer leur composition, Debussy était en train d’éditer la musique de Bach pour Durand et, bien qu'il n'ait pas terminé les trois dernières sonates, il détailla leurs instrumentations; la quatrième sonate pour hautbois, cor et clavecin; la cinquième pour trompette, clarinette, basson et piano; la sonate finale en concerto grosso pour flûte, hautbois, clarinette, basson, cor, trompette, harpe, piano, clavecin, violon, alto, violoncelle et contrebasse. Il n’est pas difficile de faire le lien entre les divers instruments de Debussy et les audacieux Six Concerts avec plusieurs instruments (1721) de Bach. Étant peut-être le plus germanique des compositeurs allemands, le « vieux » Bach était influencé à plusieurs reprises par des musiciens et compositeurs français tout au long de sa vie. Et il semble qu’à son tour, près de deux cents ans plus tard, Bach ait influencé l’un des compositeurs français les plus gaulois et les plus avant-gardistes au crépuscule de la vie de Debussy.
La musique sert de moyen de communication et d'expression au-delà du langage, de la géographie et de la chronologie. Le vocabulaire, l’instrumentation et l’esthétique spécifiques de chaque période sont, bien entendu, importants; mais seulement un point de départ. Nos recherches nous apportent de nombreuses réponses, mais elles posent encore plus de questions. Et bien que nous ayons beaucoup réfléchi à nos interprétations de ce soir, penser n’est pas le seul point… mieux, peut-être, laisser le dernier mot à Debussy:
Je puis avouer que je ne pense plus, ou presque plus, musicalement tout en étant profondément persuadé que la Musique reste à jamais le plus beau moyen d'expression qui soit ; seulement il m'apparaît dans les œuvres —qu’elles soient anciennes ou modernes, ce qui d'ailleurs n'est qu'une question de dates — une pauvreté extrême, une incapacité notoire à s'évader de la table de travail ; c'est toujours éclairé par la lampe triste, jamais par le soleil, puis planant sur le tout, le désir d'épater son semblable avec des harmonies contradictoires, le plus souvent parasites. Enfin, rien n'est moins émotionnant que la Musique, surtout maintenant, et il me semble que sans aller jusqu'au fait divers, sanglant, ou au roman, on pourrait trouver quelque chose. Il est même inutile que la Musique fasse penser ! […] Il suffirait que la Musique force les gens à écouter […] il faudrait qu'ils […] pensent avoir rêvé, un moment, d'un pays chimérique et par conséquent introuvable.
© Aleks Schürmer, 2018.
In the late-19th and early-20th centuries, the North American musical landscape was not what it is today. Lacking competitive schools, young musicians were leaving the continent and heading to study in Europe. New York’s orchestras were importing French musicians, and new recording technologies were introducing French players and their styles to American audiences. Optimism after the The Great War of 1914 and the booming economy of the New York’s années folles saw the expansion and creation of the great American artistic institutions of today.
When textile magnate Augustus D. Juilliard (1836-1919) died, he left the majority of his 5 million dollar fortune for the advancement of music—calculating for inflation, in today’s currency this represents nearly 75 million dollars. Born of French immigrant working-class parents, Juilliard was a self-made man and a lifelong patron of the arts. He was President of the Metropolitan Opera for nearly three decades. In 1920, The Juilliard Foundation was formed and its Trustees would later establish the Juilliard School to offer world-class music education in the United States. With the confluence of capital (both cultural and financial), New York quickly became a major musical hub on the world stage.
The composers and performers of the day mixed with high society in the last carefree days before the Great Depression. Far from the homogeny often present in today’s concert halls, this was a fertile artistic era with many distinct musical styles. This period is marked by the combination of old and new; the portamento, tempo modification, and melodic dislocation of the 19th century united with a more pronounced use of vibrato and newly developed extended techniques. Concert programmes married contemporary and ancient repertoires in a manner which is now standard.
Even with recorded performances from the era, the truth is we cannot say for certain what it was; primary and secondary sources, as invaluable as they are, only tell a part of the story. The instruments, music, sources, and anecdotes confirm and contradict. In the end, there is multiplicity to authenticity; we can only offer what it could have been. Or as composer Arnold Bax put it, “All artists are swayed by forces uncontrolled by themselves. […] They owe much to other artists, both past and present whose work they admire”.

A late bloomer, we know little about Jean-Philippe Rameau (1683-1764) before 1722. He rose to fame as a theorist and composer, but despite his popularity he remained a controversial figure for his modern harmonies and style. Rameau’s Pièces de clavecin en concerts (1741) are among the first to give the harpsichord a solo, rather than accompaniment role but after the Guerre des Bouffons (a philosophical war of words (1752-1754) pitting the Italian style against the French establishment), tastes shifted and his music began to fall out of fashion, eventually disappearing altogether.
As anti-German sentiment grew in France following the Franco-Prussian War (1870-1871), the performance of German music declined and French nationalism arose. The Société Nationale de Musique was co-founded by composer Camille Saint-Saëns (1835-1921) to provide performance opportunities for French composers. Revisiting the Great Masters of France’s history, Saint-Saëns edited Rameau’s works for his publishers Durand in 1896, reviving the Pièces de clavecin for the 20th century (he did not appear interested in framing the music in its historical context). In New York during the early-20th century, musicians like composer-harpist Carlos Salzedo (1885-1961) continued to perform and record the works of Rameau from the Durand editions with little awareness of historical performance practice.
In 1778, Wolfgang Amadeus Mozart (1756 –1791) travelled to Paris in search of work. Quickly running out of money and finding himself in debt, Mozart had taken to pawning his possessions in desperation. To compound matters, back home Mozart’s mother Anna Maria had fallen ill and lacking adequate finances to see a doctor, she passed away. The mood of the Sonata for Piano and Violin No. 21 in E minor K. 304 (1778), written upon receiving news of his mother’s death, reflects this particularly difficult period for Mozart. Tellingly, it is his only violin sonata written in a minor key. In tonight’s performance, the sonata has been arranged for harp and flute after the 1912 Flesch-Schnabel edition for International Music Company, containing contemporaneous phrasing marks and anachronistic ‘corrections’.
One of the most popular works, both presently and historically, of Sergei Rachmaninoff (1873-1943) is the mournful Vocalise from 14 Romances, Op. 34 (1915). Depressed and heavily in debt, Rachmaninoff immigrated to the United States in 1918 to follow employment offers as a solo pianist, conductor and recording artist. He was able to live in luxury and achieve fame through US tours, recordings and an association with piano maker Steinway and Sons. The vocalise was a popular recital favourite in the 1920s, often played by the instrumentalist stars of the period, like violinist Jascha Heifetz and thereminist Clara Rockmore.
English composer Edward Elgar (1857–1934) was among first composers to see the importance of the newly developed gramophone. With the technology quickly improving, Elgar recorded many of his orchestral works between 1914 and 1925. His Chanson de Nuit, Op. 15, No. 1 and Chanson de Matin, Op. 15, No. 2 (1897) are light compositions in a popular and typically-English style. Originally published for viola and piano, violin and piano, and arranged two years later for chamber orchestra, this arrangement is based after the composer’s own 1899 and 1901 editions for Novello & Co. Largely self-taught and born of a lower socio-economic status, Elgar felt under-respected by the British musical establishment. However, celebrated Austrian composer and violin virtuoso Fritz Kreisler (who commissioned and premiered Elgar’s Violin Concerto in 1910) told a British journalist, “If you want to know whom I consider to be the greatest living composer, I say without hesitation, Elgar”.
Claude Debussy (1862-1918) is considered among the most influential composers of the late-19th and early-20th centuries. His lush music betrays his dour personality: he wrote to fellow composer Chausson, “the colour of my soul is iron-grey and sad bats wheel about the steeple of my dreams”. La flûte de Pan (1913) was written as incidental music for Psyché, a three act play by symbolist Gabriel Mourey (1865-1943). Letters between the composer and the playwright show that with only weeks before the premiere, Debussy had nothing completed. The gentle and sensuous flute solo appears in a scene between two nymphs, bordering on the erotic. While Pan is playing his flute in the distance, the Oréade convinces the fearful Naïde to listen and allow herself to be seduced by his song; surrendering herself and becoming without fear.
A fearless man, French born Carlos Salzedo is considered the most important harpist of the 20th century. Immigrating to New York in 1909 at the invitation of maestro Toscanini to play in the orchestra of the Metropolitan Opera House, he resigned from his post in 1913 and took to touring the US and internationally. The outbreak of the Great War saw Salzedo drafted into the French Army, only returning to New York and his musical activities two years later. Through an association with legendary ballet dancer and choreographer Vaslav Nijinksy, Salzedo developed a harp playing technique that paired physical gestures with musical gestures, and extending and codifying the instrument’s musical vocabulary to its present state; Bartok, Britten, Milhaud, Prokofiev, Schoenberg and Stravinsky (to name but a few) all wrote for the harp in ways that utilized Salzedo’s new techniques and notation.
In 1921, he and fellow French ex-pat Edgar Varèse co-founded the International Composers Guild promoting new music, and the recordings and tours of his Trio de Lutèce with flutist Georges Barrères introduced the music of Debussy to new audiences. His 5 Préludes pour Harpe seule (1917) represent the most chronologically modern music in tonight’s programme; Salzedo’s music from this period is heavily coloured in shades of Debussy, while it hints at the post-tonalism that typifies his later style. Barrères (who performed the flute solo in the premiere of Debussy’s Prélude à l’après-midi d’une faune) described Salzedo as a caustic, temperamental, and disagreeable man whom Barrères often had to apologize on behalf of.
In 1915, Debussy was composing an audacious scoring for flute, viola and harp that had previously been unexplored and would subsequently become a standard chamber ensemble. Without any knowledge of this, English composer Arnold Bax (1883–1953) completed his Elegaic Trio (1916) for the same combination of instruments. Bax’s trio was composed in memorial to friends lost in Ireland’s bloody Easter Uprising (1916) where more than 2000 Irish nationals were killed or injured battling the British Empire for their independence. All this violence, however, is not evident in the music; the lush, pastoral sounds unfold as if dreaming of an idealized world. One can almost hear Cathleen ní Hoolihan (the personification of Irish nationalism, as seen in literature and art) calling her lost children home. On his music, critic John Cardus wrote, “Always through the gloom and thickets of the [music] the warm ways of an approachable, lovable man and nature may be felt”.
If Elgar was a pioneer of recording technology in Britain, Bax was most certainly not, writing in 1929, “the Gramophone is on the whole a ghastly invention”. Late in life, critics would compare the music of his pre-1905 period to Debussy. However, Bax notes that prior to 1905, Debussy was unknown to the English. Bax’s style is contemporary for the period, but his interests and influences were often historical, saying in a 1949 BBC Radio lecture:
A well known poet and critic once remarked in my hearing, ‘Thank God I can trace the literary genealogy of any poem I have ever read’. This is true also of music. There have been few composers who have sprung, like Minerva, fully armed from the brain of Jove. And these, not among the very greatest. Debussy and Chopin seem to have derived less than most from any spiritual ancestor. But even in their cases, one finds a hint of Massenet in the one, and of John Field and Bellini in the other.
The ballet El amor brujo (Love, the Magician) of Spanish composer Manuel de Falla (1876-1976) wasn’t an immediate success. Falla was studying in Paris in 1907 and met Debussy, Ravel and Stravinsky who all would prove to be major influences on his musical style. The outbreak of World War 1 forced Falla to return to Spain where he composed his best-known works. Written in 1914 and premiered in 1915, the flamenco-ballet was poorly received. After removing the dialogue, making several cuts, and much re-orchestration, it was in the 1920s that its movements took on a life of their own. The excerpt Pantomime is a lilting and seductive Andalusian melody over an irregular-metered accompaniment in 7/8 which sways gently back and forth; recalling the calm coastal tides on a warm summer’s night, far away from the turmoil of the ongoing war.
The north of France had been occupied by German troops, yet you’d be hard pressed to hear those battles in Debussy’s Sonate pour flute, alto et harpe (1915). Debussy intended to write 6 sonatas for diverse instruments as an homage to the French masters of the 18th century. In a letter to Durand, he lamented: “What about French music? Where are our old harpsichordists who produced real music in abundance? They held the secret of that graceful profundity, that emotion without epilepsy, which we shy away from like ungrateful children”. Debussy become increasingly nationalistic, as Saint-Saëns had been thirty years prior; though Saint-Saëns had fiercely disapproved of Debussy’s music and sought to ensure Debussy never became a member of the Académie de musique (he never did). Writing to Durand, Debussy displays his nationalism: “I want to work– not so much for myself, as to provide a proof, however small, that 30 million Boches can’t destroy French thought, even when they’ve tried undermining it first before obliterating it.” On the title page for the sonata, Debussy even specifies his title: Musicien Français. According to musicologist Léon Vallas, Debussy planned to compose a work for flute, oboe and harp but subsequently decided that the viola would better suit the flute’s timbre. He only completed three of the six, owing to his worsening health.
In 1916, Durand arranged for a private reading of the sonata with flutist Albert Manouvrier, violist-composer Darius Milhaud, and chromatic harpist Jeanne Dalliès. Flutist Marcel Moyse was in attendance and claims that a gruff Debussy, responding to a question about a written rhythm, shocked those in the room by yelling, “Don’t play what you think I should have written— play what I wrote!”. Music from his late-period is substantially more precise in its notation than in Debussy’s earlier work. Tempo indications are given as frequently as each half-bar and instruments are given contrasting gestures for the same figure. Displaced motives coupled with frequent changes of metre and polyrhythm, give the Sonate a sense of freedom not echoed on the page. Music critic and close friend of Debussy, Georges Jean-Aubry, claims that the composer told him afterwards, “I want to hear my sonata played on something other than that horrible instrument! I want to hear it on [a pedal harp]!”. Only Manouvrier made it to the first public performance in the presence of the composer, joined by pedal-harpist Pierre Jamet and violist Sigismond Jarecki. Jamet worked closely with the composer and recorded the work several times over his career.
As with Bax’s trio, Debussy’s sonata imagines an idealized landscape seemingly far from the horrors of war. His trademark use of mode and whole tone scale combine with French folkloric elements (the opening of the Finale is meant to emulate the piffaro of Southern France), and structural ideas of the eighteenth-century. Debussy’s long-held and well-documented love for Japanese art and aesthetic is equally on display. At times one can almost hear the Great Wave of Katsushika Hokusai (1760-1849) crashing tumultuously down, while elsewhere the flute appears to imitate the traditional shakuhachi. The sonata’s moments of restrained emotion share the stage with the playful virtuosity of Debussy’s youth. On the sonata, Debussy noted, “It’s frighteningly melancholic. And I don’t know if one should laugh or cry about it? Maybe both?”
Ironically, the genesis for Debussy’s Sonates pour divers instruments appears to have come from Johann Sebastian Bach (1685-1750). Just prior to beginning their composition, Debussy was editing Bach’s music for Durand, and while he did not complete the last three sonatas, he detailed their instrumentation; the fourth sonata for oboe, horn and harpsichord; the fifth for trumpet, clarinet, bassoon and piano; the final sonata as a concerto grosso for flute, oboe, clarinet, bassoon, horn, trumpet, harp, piano, harpsichord, violin, viola, cello and double bass. It is not hard to make the connection between Debussy’s divers instruments and the audacious Six Concerts avec plusieurs instruments (1721) of Bach. Perhaps the most Germanic of German composers, the old fashioned Bach was repeatedly influenced by French musicians and composers throughout his lifetime. And it seems, in turn, nearly two hundred years later, Bach influenced one of the most Gallic and forward-thinking of French composers in the twilight of Debussy’s life.
Music serves as a means of communication and expression beyond language, geography and chronology. The specific vocabulary, instrumentation, and aesthetic of each period is, of course, important; but only a starting point. Our research gives us many answers, but it poses even more questions. And though we have thought a great deal about our interpretations tonight, perhaps thinking isn’t the only point… better, perhaps, that we leave the final thought to Debussy (from a letter to composer Paul Dukas, dated 1901) :
I confess that I am no longer thinking in musical terms, or at least not much, even though I believe with all my heart that Music remains for all time the finest means of expression we have. It’s just that I find the actual pieces — whether they’re old or modern, which is in any case merely a matter of dates — so totally poverty-stricken, manifesting an inability to see beyond the work-table. They smell of the lamp, not of the sun. And then, overshadowing everything, there’s the desire to amaze one’s colleagues with arresting harmonies, quite unnecessary for the most part. In short, these days especially, music is devoid of emotional impact. I feel that, without descending to the level of the gossip column or the novel, it should be possible to solve the problem somehow. There’s no need either for music to make people think! It would be enough if music could make people listen […] It would be enough if they […] felt that for a moment they had been dreaming of an imaginary country, that’s to say, one that can’t be found on the map.
© Aleks Schürmer, 2018.